Saint Ildefonse de Tolède (607-667) est le saint le plus populaire de l’Espagne. Né à Tolède, il fit ses études à Séville, devint moine puis abbé d’Agli, et enfin archevêque de Tolède en 657. Écrivain d’une rare éloquence, ses œuvres ont permis uniformisation des liturgies espagnoles, mais surtout la défense de la virginité de Marie. Grand dévot de la Vierge Marie, dont il se voulait serviteur parce que son Fils est notre Seigneur, il fut en effet gratifié de plusieurs visions, et demandait à la Vierge de l’Annonciation l’Esprit du Seigneur, admirant le mystère de l’Incarnation, réalisé pour nous. Il composa également des œuvres liturgiques en l’honneur de la Vierge Marie. On le fête localement le 23 janvier.
Neveu de saint Eugène de Tolède, et issu d’une famille alliée au sang royal, saint Ildephonse naquit le 8 décembre 606, jour qui a été depuis consacré à l’Immaculée conception de la Vierge Marie. On rapporte que c’est grâce à l’intercession de la Vierge Marie que l’enfant vint au monde.
Ildephonse étudia pendant douze années à Séville, auprès de saint Isidore de Séville, docteur de l’Église (560-636). Ildephonse entra ensuite à l’abbaye Saint-Cosme-et-Saint-Damien d’Agali, près de Tolède, puis devint archevêque de Tolède en 657, jusqu’à sa mort, le 23 janvier 667. À ce titre, il présida les VIIIè et IXè conciles de Tolède, qui eurent lieu en 653 et 655. À sa mort, le 23 janvier 667, il fut d’abord inhumé dans l’église sainte Léocadie de Tolède, puis ses restes furent transférés dans l’église de Zamora, dans les Asturies. On les découvrit au XIIIès, et cette découverte fut à l’origine de l’afflux d’un grand nombre de pèlerins dans la Castille médiévale.
Saint Ildephonse est connu pour sa dévotion mariale et ses nombreuses œuvres, mais également pour les visions dont il fut gratifié.
Le traité sur la Virginité perpétuelle de Marie
Écrivain doué d’une grande éloquence, st Ildephonse a écrit de nombreux ouvrages, dont certains ont permis l’unification des liturgies espagnoles. Le plus notoire est cependant celui qu’il a consacré à la défense de la virginité perpétuelle de la Vierge Marie -avant, pendant et après l’enfantement de Jésus[1], intitulé Libellum de Virginitate Sanctae Mariae contra tres infideles. Ce traité, construit en douze chapitres, est adressé aux trois détracteurs de la virginité perpétuelle de la Vierge Marie: Jovinien, Helvidius et les Juifs, qui s’étaient tous faits les porte-paroles de l’hérésie niant cette virginité mariale.
Saint Ildephonse y démontre, en s’appuyant sur de nombreuses citations scripturaires, que Marie est la vierge annoncée dès l’Ancien Testament, que l’Incarnation a eu lieu pour le salut des hommes, que le fils de Marie est Dieu, que le Christ est homme et Dieu, et que la toute-puissance de Dieu a permis le maintien de la virginité de Marie[2].
Les visions
Saint Ildephonse fut gratifié de plusieurs visions : de la Vierge Marie et de sainte Léocadie, la célèbre martyre de Tolède du IVès.
Le jour de sa fête, le 9 décembre, sainte Léocadie apparut à saint Ildephonse en prière, et lui découvrit ses reliques, que saint Ildephonse souhaitait ardemment retrouver. Pour garder trace de cette vision, il saisit l’épée du roi qui l’accompagnait et coupa une portion du voile de sainte Léocadie[3]. C’est ainsi que le saint put ensuite localiser les reliques de la martyre.
L’une de ses visions est particulièrement célèbre. Elle est rapportée dans la Vie de saint Ildephonse, rédigée par Cixila. Dans la nuit du 18 décembre 665, accompagné de son clergé, saint Ildefonse, accompagné de son clergé, se rendit dans sa cathédrale de Tolède, placée, à la fin du siècle, sous le patronage de Sainte Marie, pour y préparer Noël avec son clergé. La Vierge lui apparut dans l’une des chapelles de la cathédrale, assise dans la cathèdre d’ivoire, et lui dit :
«Dépêche-toi de venir à ma rencontre, sers Dieu ô très cher, reçois ce cadeau de ma main que je t’apporte du trésor de mon Fils: il faut en effet, en raison de la bénédiction de ce vêtement qui t’est remis, que tu l’utilises en ce jour qui m’est consacré. Car, les yeux fermes dans la foi, tu es toujours resté à mon service et, pour ma louange, par la grâce répandue sur tes lèvres, tu m’as dépeinte avec tant de douceur dans le cœur des fidèles, il faut que tu sois déjà orné des vêtements de gloire dans cette vie, et que dans le futur tu te réjouisses dans ma maison avec les autres serviteurs de mon Fils».[4]
La Vierge Marie le recouvrit alors de cet habit.
Cette apparition a donné lieu à un jour de fête dans l’Église espagnole afin de perpétuer sa mémoire :
« La liturgie wisigothique, pratiquée durant tout le haut Moyen Age, au sud comme au nord de la Péninsule, observa les préceptes du Xe concile de Tolède de 656, et célébra, le 18 décembre, la fête de l’’Apparitionis Marie matris Iesu, Sancte Marie Virginis’ ou ‘Sancte Marie Virginis et Genitris Dei’; elle rappela également, ainsi qu’en témoignent les calendriers conservés depuis 961, le 23 janvier, l’’obitus Ildefonsi archiepiscopi Toletani’»[5].
L’influence du traité de Saint Ildephonse sur la reconnaissance de la Virginité perpétuelle de la Vierge Marie a donc été très importante, puisqu’elle a permis le développement d’une dévotion mariale à partir du Xès en Espagne, dévotion qui a perduré dans les siècles suivants.
La postérité de saint Ildephonse dans l’art
Le thème iconographique de la donation de la chasuble à saint Ildephonse devint très important à partir du XVès dans l’art espagnol, et de grands peintres l’ont traité :on peut citer par exemple le tableau de Murillo intitulé l’Imposition de la chasuble à saint Ildefonse (1560), ou celui de Vélasquez intitulé l’Imposition de la chasuble à saint Ildefonse (1623). saint Ildefonse est également représenté dans l’église sainte Léocadie de Tolède. Le poète Rainer Maria Rilke fut particulièrement touché par cette vision de saint Ildephonse.
Prions Marie qui défait les nœuds, par l’intercession de saint Ildephonse de Tolède qui a tant œuvré à cette reconnaissance, de permettre à ceux qui ont des difficultés à croire à la Virginité perpétuelle de la Vierge Marie d’entrer dans ce grand mystère et d’en recevoir les fruits spirituels.
Sources :
-Adeline Rucquoi. Ildephonse de Tolède et son traité sur la virginité de Marie, In: La virginité de Marie, Médiaspaul, pp.105-125, 1998.
-P.Giry. Les petits Bollandistes : vies des saints. (T. I. Source gallica.bnf.fr Bibliothèque nationale de France).
I. Rolland