Certains auraient peut-être aimés être témoins de la création d’Adam et Eve, mais peu de ses contemporains ont réalisé qu’ils voyaient dans la jeune Vierge Marie une nouvelle création qui dépassait de loin l’ancienne. Titien nous donne un aperçu de sa sainteté radieuse pendant qu’elle monte les escaliers du Temple à l’âge de trois ans (d’après les écritures apocryphes) pour y vivre une vie consacrée.

Il nous montre comment l’amour lumineux de Dieu se révèle à travers elle, bien que cela n’est aperçu, hélas, que par peu de personnes ; car seuls ceux dont le cœur a été purifié par la souffrance et transformé par l’amour ont la capacité de percer le voile de l’ordinaire, qui couvre une sainteté si grande que nous jubilerions si seulement nous étions conscients de sa présence.
La Sainte Vierge a toujours mené une vie cachée, mais encore plus quand elle était enfant. Car la promesse des enfants n’est connue, en générale, que par leurs parents. Mais en ce cas, Joachim et Anne auraient d’autant plus humblement gardé caché du regard public qu’il y avait quelque chose d’extraordinaire en elle. Sa présentation au Temple, pourtant, était un moment public de sa vie où ceux qui voulaient voir (du moins, jusqu’à un certain point et par la grâce de Dieu) le pouvaient. Peut-être que ses parents avaient déjà décelé qu’elle était le premier signe de la promesse faite par Dieu de renouveler notre monde déchu.

La confiance de Marie
Titien dans sa peinture de la présentation de Marie au Temple (1534-8) exprime cela parfaitement : lui qui aimait tant peindre des vêtements riches et extravagants dépeint Marie dans une robe bleue toute simple et avec des traits qui ne sont même pas remarquablement beaux. C’est sa beauté intérieure qui rayonne et qui fait que tout le monde la regarde bien qu’avec des niveaux de compréhension différents. Elle marche avec la prestance d’un adulte et avec la grâce d’une reine, mais en même temps avec une ouverture de cœur que l’on ne trouve que chez les enfants – s’ils n’ont pas été trop blessés – qui s’attendent à être aimés où qu’ils aillent. Mais chez la Vierge cette ouverture est absolue, car elle est remplie de grâce, sans aucune crainte et totalement imprégnée par l’amour de Dieu. Nous autres enfants d’Adam et Eve, souillés par le péché originel, avons tous hérité de la méfiance de nos premiers parents ; au lieu de courir vers Dieu avec un cœur contrit après avoir mangé du fruit défendu, Adam et Eve se sont cachés dans le jardin. Seul le Christ a pu guérir cette rupture. Et nous, bien que baptisés, avons souvent besoin d’une longue transformation pour croire en Son amour inconditionnel, d’où l’importance des dévotions comme celles de St. Faustine ou St. Marguerite Marie Alacoque.
Marie monte les escaliers du Temple avec la joie de celle qui va entrer dans la maison de son Père. Elle vient pour se donner totalement à Celui qui est l’Amour. Ceci l’aide à surmonter son chagrin de quitter ses parents qui aura sûrement été très grand, non seulement puisqu’elle est encore bien petite, mais aussi parce qu’elle a un cœur particulièrement sensible et qu’elle aura partagé la tristesse de ses parents. Mais elle suit son appel qui est d’aimer inconditionnellement. En même temps, elle se rend compte de la gravité de l’occasion comme sa posture et sa démarche le démontrent.

Les Spectateurs
Le Grand Prêtre habillé de ses vêtements sacerdotaux est l’un des rares personnages qui se rend compte que quelque chose d’extraordinaire est en train d’avoir lieu. Lui aussi est très solennel tout en ayant ses bras étendus, ce qui semble être un mélange entre un geste liturgique et une attitude d’émerveillement devant cet enfant si rempli de l’amour de Dieu. Les autres témoins expriment tout une rangée d’émotions allant de l’indifférence à la curiosité jusqu’à l’admiration. Ils portent des habits de la Renaissance ou des tuniques sensées ressembler celles de l’Antiquité, ce qui indique une vérité plus profonde : que les habitants de cette ville (laquelle ressemble plus à une ville Romaine classique avec un paysage Italien au fond qu’à l’ancienne ville de Jérusalem) nous représentent. Nous tous qui permettons aux grâces de Dieu de tomber du coté du chemin, d’ être étouffées par les ronces, de rester en surface – ou quelquefois de porter du fruit. Ceux qui sont penchés à leurs fenêtres et balcons ne sont que des curieux, sauf l’homme qui se trouve tout à droite, dans la pénombre de sa fenêtre, et qui semble très recueilli et frappé par ce qu’il voit. Quelques dignitaires vêtus de noir sont probablement des membres de la fraternité Scuola Grande di Santa Maria della Carita qui avaient commandé cet œuvre chez Titien et qui regardent la scène avec rien de plus qu’un intérêt poli.
Les parents âgés de Marie se tiennent discrètement un peu en arrière. Joachim se tourne vers Anne en lui touchant l’épaule comme s’il voulait la consoler, pendant qu’elle regarde intensément Marie monter les escaliers. Pendant beaucoup d’années, ils avaient espéré avoir des enfants, mais leur souhait n’avait qu’été exaucé que lorsqu’ ils furent bien avancés en âge. Et ce grand cadeau, une fois reçu, ils l’ont donné à Dieu après seulement trois an ; et quand Marie quitta – d’après la legenda aurea, la Légende dorée – le Temple à douze ans, ses parents étaient déjà décédés. Quel sacrifice ! Car Marie n’était pas seulement un enfant affectueux et d’une délicatesse exquise, mais aussi la consolation de leur vieillesse.
Tout à droite il y un personnage mystérieux qui sort du Temple. On dirait qu’il personnifie la mort, bien qu’il ne soit peut-être qu’un vieillard préfigurant Siméon qui verra dix ans plus tard le petit Jésus au Temple. Mais s’il représente la mort, alors il est là pour apercevoir les premiers signes annonçant la fin de son règne ; car Marie deviendra l’Arche de la Nouvelle Alliance, puisqu’elle portera dans ses entrailles le Christ qui vaincra la mort après l’avoir subi Lui-même. La présentation de Marie au Temple sera donc son premier pas sur son chemin vers Golgotha où le sacrifice suprême lui sera demandé. Son don de soi, commencé dans le Temple la mènera à une kénose totale semblable à celle du Christ sur la Croix. Lui qui était le Temple est mort pour que nous puissions devenir ses pierres vivantes. En se présentant donc au Temple, la Vierge annonce déjà le nouveau Temple qui sera détruit et reconstruit en trois jours. Ainsi, elle ouvre le chemin pour nous, devenant la co-mediatrice de toute grâce.
Priez pour nous, Vierge Marie, et défaites les nœuds dans nos vies pour que nous puissions faire parfaitement confiance en Dieu comme vous.
Marie Meaney, 15 Novembre 2018

Source : https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/7/7a/%22Pr%C3%A9sentation_de_la_Vierge_au_Temple%22_de_Titien_%28Accademia%2C_Venise%29_%288103563222%29.jpg

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