La vénération s’attache en général à tout ce qui est sacré, à ce mystérieux que l’on découvre dans le culte et les idées de primitifs et que l’on retrouve dans toute religion.
On vénère des personnages respectés qui ont rendu de grands services à l’humanité ; mais on vénère aussi l’ancêtre familial, le patriarche présidant aux destinées du clan ou de la cité ou l’évêque âgé qui défend sa ville ou son peuple ; tous sont dignes de la vénération des hommes. Si l’on vénère les reliques des saints ou les ossements des martyrs, que dire de Jésus de Galilée, Fils de Dieu qu’on doit adorer comme Dieu Sauveur des hommes, et de Marie, sa mère qu’on se doit de vénérer comme mère de Dieu et mère des hommes.
Nous allons découvrir la raison de la vénération de Marie qui est une femme avec une telle sainteté qu’elle est selon saint Bernard « Le Chef d’œuvre du Tout Puissant » tellement qu’elle a été posée ainsi par lui, au-dessus de tout ce qui n’est pas lui-même, c’est-à-dire qu’on ne peut pas faire de Marie, un être divin ou lui attribuer ce qui est propre à Dieu. Cependant on doit lui rendre tout honneur, tout hommage et tout culte qui lui sont dus comme Mère de Dieu.
Les demeures du Ciel
S’il y a plusieurs demeures dans la maison du Père céleste, cela signifie qu’il y a entre ceux qui les habitent beaucoup de différence de gloire. Entre les neuf chœurs des anges et la gloire des saints qui habitent le Ciel, il y a encore entre ce monde magnifique et Dieu, un autre monde resplendissant de beauté et de gloire : c’est celui de La Vierge Marie, Mère du Christ et Mère de Dieu. C’est pourquoi l’Église lui voue un culte spécial, un culte d’honneur et jamais d’adoration, un culte d’hyperdulie qui est incomparablement plus élevé que le culte de dulie rendu aux saints du Ciel.
La Vierge Marie reçoit un culte suréminent comme l’est sa personne, au-dessus de toute autre gloire et de tout honneur possible qu’on puisse rendre à tout autre créature comme elle est elle-même au-dessus de tout ce qui n’est pas Dieu par sa dignité, ses relations et ses influences actives.
Marie est vénérable par sa dignité
Cette dignité ressort comme celle de tous les autres saints, de son union avec le Christ, Source de tout bien, de toute vertu et de toute grandeur. Mais son union avec le Christ est incomparable. Elle est la fille du Père et comme le Père et le Fils ne font qu’un, elle est aussi la fille du Christ au point d’être sa mère par la volonté du Père. Elle est la fleur du Christ comme tous les anges et les saints au point d’être la tige même du Christ d’où toutes ces fleurs anges ou saints tirent leur parfum et leur splendeur. Elle est donc leur parfum et leur splendeur à tous. Elle en est l’idéal et la forme, comme elle est le parfum créé et la splendeur créée du Christ lui-même. Tout ce que les saints ont en parties, elle l’a et ne peut l’avoir qu’en plénitude soit en vertus, soit en gloire. Elle est par vocation et par sa nature de mère de Dieu, l’océan de tout richesse, de tout mérite, de tout honneur et honorabilité qui puissent se trouver soit dans l’ange, soit dans le saint.
Marie est vénérable par ses relations
Sur terre, on se fait des relations par son adresse, les circonstances de la vie ou le génie naturel. Mais avec Dieu, tout dépend de la volonté divine, de notre vocation et de notre élection. Pierre fut appelé et élu chef des Apôtres ; Paul sera l’Apôtre des païens et saint François et Saint Dominique seront des fondateurs d’Ordres religieux. Mais au-dessus de ces élections, il y a une femme, une simple vierge qui fut élue par Dieu à des destinées bien supérieures. Marie fut appelée non plus comme conséquence d’un projet divin, mais comme principe de ce projet éternel à entrer en des relations intimes et incompréhensibles non seulement aux hommes, mais encore aux anges les plus sublimes. Et ce projet éternel incompréhensible aux hommes et aux anges se réalise avec les trois personnes de la Sainte Trinité qui sont le Père qui a pensé et élu Marie comme la Mère de son divin Fils ; le Fils qui a pris en elle son humanité et le Saint Esprit qui la couvrit de son ombre pour insuffler en elle l’Emmanuel, Dieu parmi les hommes avec la mission sublime de les instruire et de les sauver.
En fait, toute la grandeur vénérable de Marie se manifeste dans l’œuvre trinitaire réalisée en elle : le Père a pensé à Marie depuis toujours ; son Fils Jésus l’a eu pour mère par la volonté du Père, et l’Esprit Saint devint son Époux en lui donnant le Verbe incarné. Chaque personne trinitaire agit en vue du salut de l’humanité.
La grandeur de Marie se manifeste encore par Jésus en croix qui la donne à saint Jean en lui disant : « Voici ta mère, sous-entendu, je rejoins mon Père mais je vous laisse ma mère. » Elle devient ainsi la mère de tous les vivants. Et quelle importance une telle relation de Marie avec son Fils le Rédempteur de l’humanité qui nous la donne pour devenir la mère de tous les hommes et la mère de son Église du ciel et de la terre. Tous les dons si précieux qu’il répandra sans cesse sur les apôtres, les martyrs, les docteurs, les confesseurs et les vierges, il les place d’abord en Marie qui devient la Mère de toutes les grâces et de toutes les vertus à répandre sur le monde. Une telle relation de Marie avec le Père, le Fils et le Saint Esprit nous révèle que la Vierge Marie est à elle seule un monde à part non seulement de vertus mais de gloire.
Marie est vénérable par ses influences actives sur le monde
Ces influences sont la conséquence de ses relations avec la Sainte Trinité. Sa relation avec le Père universel de toute existence lui donne autorité sur toute la création. Elle en est la fille aînée et comme son Fils qu’elle a engendré en est le roi suprême, elle en est la Reine de droit divin. Sa relation avec le Verbe incarné la met à la racine et à la source de la Rédemption et la fait mère de toutes les générations divines comme son Fils en est le vrai Père. Sa relation avec le Saint Esprit sanctificateur de tout le Corps du Christ, des membres comme du chef fait d’elle le réservoir et l’aqueduc de toute grâce, de toute vertu, de toute sainteté en même temps que la porte du ciel et l’océan de toute gloire céleste d’où tous les élus anges et saints prendront la part revenant à leurs mérites personnels.
L’humble Vierge Marie est ainsi posée par Dieu au-dessus de tout et mérite à elle seule plus de gloire et d’honneur que n’en mérite et ne pourra jamais en mériter aucune créature.
Ce qui fait Marie Vénérable est le fait qu’elle est Reine de la création, de la grâce, de la gloire, Reine des royaumes et de tout l’univers créé qu’en vue de l’incarnation de son Fils ; elle est Reine de tous les élus (anges ou hommes) qui ne furent prédestinés que dans le fruit de ses entrailles ; elle est la Reine de l’Église et de chaque ordre de sainteté qui a pu ou pourra y fleurir, comme elle est la Reine du Ciel et de toutes les hiérarchies célestes.
Elle est la fille du Père choisie de toute éternité, la mère du Fils qui est le Roi éternel des siècles, qui a tout créé et qui par sa rédemption, Est le Principe de toute vie surnaturelle ; elle est l’épouse de l’Esprit Saint qui d’elle a forme le Chef de l’Église, mais aussi tous les membres de ce grand Corps merveilleux de sainteté et de gloire, de lumière et de vie qui est le vrai but de l’Incarnation et par lequel Jésus, Fils de Marie, pourra enfin ramener avec lui tout qui avait été créé et prédestiné dans l’unité divine.
Face à toute cette gloire, Marie répond « Je suis l’humble servante du Seigneur, qu’il me soit fait selon votre parole ! » Marie est si grande par son humilité et son effacement devant Dieu et plus elle est glorifiée, plus elle glorifie elle-même son Dieu de qui elle tient tout. Et Dieu s’est fait en elle le plus merveilleux instrument de gloire qu’il ait pu inventer. Et toute la gloire de Marie s’élève d’un seul cœur dans le Magnificat : « Mon âme exalte le Seigneur, mon esprit exulte de joie en Dieu mon Sauveur ! » Et c’est dans son assomption que toute l’humanité peut prendre elle-même son vol vers la gloire divine. Sa gloire est la mère de notre gloire à tous.
Prions Marie qui défait les nœuds de nous ouvrir les yeux et le cœur pour la vénérer sans cesse comme notre Mère à qui nous devons tant de grâces pour devenir avec elle par son intercession les enfants bien aimés de son divin Fils pour l’éternité. Amen
Père François ZANNINI